Gallimard
En 1922, à Nahbès au Maghreb, débarque une équipe de cinéma hollywoodienne au milieu de la microsociété coloniale (pardon, c’est un protectorat) durablement sclérosée et rétrograde. Cette présence va chambouler et révéler bien des choses chez certaines figures locales. Dont Raouf, jeune indigène et fils du caïd local qui va se retrouver à faire « le guide » de Kathryn, la très belle actrice américaine ; mais aussi Rania, jeune veuve énigmatique et tiraillée ; Gabrielle la journaliste parisienne ou encore Ganthier, le grand propriétaire terrien.
Dans les années 20, dans ce protectorat, les colons français se font appeler : « les prépondérants ». Qu’est-ce que c’est ? Une réponse faussement naïve nous est apportée page 363 du roman dans le dialogue de deux Tunisiens :
« – C’est quoi la prépondérance ?
– C’est quand tu prépondères.
– Qu’est-ce que ça veut dire ?
– C’est quand tu as les mitrailleuses et les Sénégalais.
– Les Français ils disent que tu es prépondérant quand tu es plus civilisé. […]
– Alors les Américains ils prépondèrent les Français ? »
Un extrait très éclairant sur ce ménage à trois qui s’installe avec l’arrivée des Américains, qui n’est pas à l’avantage des « prépondérants » dont l’attitude réac et passéiste n’en est que plus visible et pathétique, à rebours du sens de l’histoire, qui serait risible si elle n’était pas si sanglante et lourde de conséquences qu’on paie aujourd’hui encore.
Un roman historique, intelligent et original, vraiment bien écrit, d’un auteur discret dont j’avais vraiment adoré son premier titre : « Waltenberg ».
Christophe
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