Actes Sud
Souvenez-vous de « L’étranger » de Camus (ne me dites pas que vous n’avez pas lu ce chef d’œuvre, ça me ferait beaucoup de peine). Meursault, sur une plage d’Algérie, ivre de trop de soleil, tue « un arabe ». On le condamne à mort, pour des raisons pas très bonnes d’ailleurs.
En attendant il y a « un arabe » assassiné, pas de nom laissé à la postérité, tout le monde semble s’en foutre. Dans un premier temps la démarche de Kamel Daoud m’a parue floue. Ainsi que le titre « contre-enquête ». Car ça n’en est pas une. Les 50 premières pages ressassent un peu cette même idée : Haroun, le narrateur, veut rendre justice à son frère Moussa, « l’arabe », en faisant comprendre que ce chef d’œuvre si bien écrit (le livre de Camus) est foncièrement un livre de colon, avec des problématiques de Blancs, une histoire orientée. La frontière entre fiction et réalité (Meursault / Camus) est si poreuse dans ses propos, qu’on ne comprend plus bien où il veut vraiment en venir. Et Kamel Daoud atteint une certaine limite qui tend à reprocher à un auteur ses propos et situations fictionnels qui ne concernent que ses personnages et non lui en tant que personne.
Puis à partir de la moitié du roman, ça devient captivant, car au final K. Daoud oublie un peu son affaire pour se recentrer sur le narrateur Haroun. Et pour le coup c’est un personnage passionnant. Revenu de tout, de la période coloniale, de l’Algérie d’aujourd’hui, de la religion, de l’amour. Et de l’alcool. Un point de vue détonnant sur ce pays et les Musulmans d’une manière générale. Passionnant et même émouvant.
Et je serais tenté de conclure que Meursault, Camus, L’étranger, tout ça, finalement, on s’en fout un peu.
Christophe
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