1918 : les destins d’Albert et Édouard vont se lier au front dans des conditions incroyables. Alors que l’un (Albert) est coincé dans un trou d’obus (menacé par le terrible lieutenant Pradelle), l’autre (Edouard) se sacrifie pour le sauver. Il y laissera la moitié inférieure de son visage : le voilà devenu une « gueule cassée » au sens propre. L’Armistice venue, Albert prend soin de son sauveur, question de principe et d’humanité. Sauf qu’Édouard ne veut plus retrouver sa famille (les Pericourt, des gens influents) et souhaite passer pour mort au combat. Bien que résolument contre cette idée, Albert l’aide jusqu’au bout. Question de principe là encore. Et même quand Édouard imagine l’escroquerie incroyable des faux monuments aux morts, Albert est encore là. Mais leur route croisera à nouveau celle de Pradelle, dont l’ascension d’après guerre ne semble pas connaître de limites. Et question magouilles, Pradelle trouvera à qui se mesurer.
Le Goncourt 2013 est un grand roman populaire, foisonnant, truculent, violent, drôle et terrible. Ce qu’on appelle une « grande fresque ». Et dans ce registre c’est clairement une réussite. Lemaître évite de tergiverser : c’est le roman des petits, des oubliés, des Poilus, contre la hiérarchie militaire veule et lâche de cette époque terrible et des profiteurs de tout poil. Et si tous auront recourt à l’escroquerie, Albert et Édouard ne le feront que pour survivre, comme un pied de nez à cette France d’après guerre qui, après avoir massacré ses enfants en quantité industrielle, semble vouloir leur rendre hommage comme pour soigner sa mauvaise conscience à coup de monuments, de valeurs et de patriotisme malsains et pour le coup carrément déplacés.
Un vrai bon moment.
Christophe
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