ARCHIPEL DES SOLOVKI (L’) – Zakhar PRILEPINE


 ★★★★½ 

Actes sud

Dans les années 30, Artiom jeune homme parricide, purge sa peine dans ce qui fut le prototype de l’effroyable goulag soviétique : le camp des îles Solovki. On y croise des traitres à la Révolution, des anciens de l’Armée blanche, mais aussi de l’Armée rouge, des moines, des gosses, ainsi que des droits communs, tout un ramassis de types et de femmes hagards de se retrouver dans la gueule de l’enfer. L’arbitraire quotidien, prolongement concentrationnaire de la tyrannie de ce régime paranoïaque et ubuesque, abrutit des milliers de pauvres hères à coup de travaux forcés, d’incarcérations, de tabassages voire d’exécutions. Dans ce contexte ahurissant, Artiom a la drôle (et mauvaise) idée de tomber amoureux de Galia, téchkiste et maîtresse d’Eichmanis le chef de camp. Ce sera le seul canevas romanesque de ce pavé chargé du début à la fin d’une précision et d’une puissance documentaires glaçantes.

Prilepine, auteur aussi passionnant que le bonhomme pose question à nos yeux d’Occidentaux (le gars est militaire, dans la veine, dit-on, d’un Limonov, baignant dans l’oxymore politique qu’est cette frange gauchiste-nationaliste russe) réussit clairement une œuvre de tout premier plan, dans la plus pure tradition des grands romans russes.
On pense aussi, bien entendu, à Soljenitsyne. C’est fort, passionnant et sidérant.

On referme les 800 pages de « L’Archipel » littéralement sonné en songeant à celles et ceux des Solovki, que l’écrivain est parvenu à sortir de l’oubli de la mort, de l’histoire et de cette fâcheuse aptitude qu’ont toutes les dictatures à dissoudre l’individu dans un collectif broyeur et digestif.

Christophe
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