Alger, 1956. Fernand Iveton est type sympa comme tout, une crème, toujours un sourire, attentif, soucieux des autres et notamment de son adorable femme Hélène. Des traits de caractère qui le poussent à être solidaire des Algériens en particulier et de tous les hommes en général. Qui lui font croire en la capacité et surtout au droit de ce pays à vivre son indépendance pour le bien des Arabes, mais aussi des Européens, des Juifs, des Kabyles et j’en passe. Alors quand on demande à ce grand gars d’aller poser une bombe, il ne veut pas qu’il y ait de victimes, uniquement des destructions matérielles. Il choisit pour cible l’usine dans laquelle il travaille. L’opération tourne court, il se fait arrêter. La bombe n’explosera pas.
Mais rien à faire, la situation est tellement tendue, que la justice coloniale veut faire d’Iveton « le terroriste » un exemple.
Dans son premier roman, Joseph Andras s’attaque à cette histoire à la fois pathétique et exemplaire. Dans un style malheureusement trop ampoulé, trop travaillé pour être naturel (jusqu’au titre du livre), l’auteur réussit malgré tout à nous faire saisir l’essence même de la personnalité attachante d’Iveton, l’idéaliste arrêté, torturé, jugé puis guillotiné ainsi que le déshonneur du système politique colonial français, nation dont on peine à croire qu’elle est celle qui s’est levée contre le nazisme une grosse dizaine d’années plus tôt.
Absurde et kafkaïen, « De nos frères blessés » est un récit glaçant jusqu’à la dernière ligne. Une dernière ligne inachevée, tranchée d’une virgule, d’une réussite et d’une force magistrales.
Un court roman à la mémoire des René Coty, Guy Mollet et François Mitterrand, « la raison d’État » qui lui aura refusé sa grâce.
Christophe
retour à la liste de conseils romans